Après l'abomination des derniers évènements survenus dans notre pays, lesquels d'ailleurs je n'ai ni aucune envie ni même aucune prétention d'en vouloir ici venir commenter les faits, ou je ne sais quelles impressions d'ailleurs, bref, il est par contre de mon droit [pour ne pas dire "devoir"] et des plus essentiel que d'y penser à mon tour...En ce sens, j'en viens à m'interroger sur quelques fondements dont je vous livre, tels quels, les arguments qui eux-mêmes tentent de les mettre en forme, en mots et en réaction à l'époque, au combien "actives" peut-être, et dont nous sommes plus ou moins tous témoin aujourd'hui...
Pour m'aider dans cette réflexion, je prendrais à témoin celui dont nous célébrons cette année la date d'anniversaire, je veux parler de Jean-jacques Rousseau (1712-1778). Celui-ci même qui, au delà d'avoir écrit de Grands textes, tous plus étudiés les uns que les autres et comme à titre de seuls exemples le premier "Du contrat social, mais aussi ceux qui lui sont le plus étroitement liés, à savoir le second "Discours sur l''origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes", ou le "Discours sur l'économie politique", "L'Emile...", et "Les lettres écrites de la montagne" ainsi que ses textes sur la Pologne ou la Corse, tous particulièrement "édifiants" et pour celui qui s'intéresse à la philosophie politique...mais ici, en particulier, un texte "Manuscrit de Genève" que je vous invite à méditer :
"Sitôt que les h[ommes] vivent en société il leur faut une Religion qui les y maintienne. Jamais peuple n'a subsisté ni ne subsistera sans Religion et si on ne lui en donnait point, de lui-même il s'en ferait une ou serait bientôt détruit. Dans tout Etat qui peut exiger de ses membres le sacrifice de leur vie celui qui ne croit point de vie à venir est nécessairement un lâche ou un fou ; mais on ne sait trop à quel point l'espoir de la vie à venir peut engager un fanatique à mépriser celle-ci. Otez ses visions à ce fanatique et donnez lui ce même espoir pour prix de la vertu vous en ferez un vrai citoyen".
En lisant ces lignes nous pouvons en effet en chercher le sens original et là, y rechercher peut-être toutes les similitudes d'avec notre temps, dans ce que ces mots ont de plus contemporains, de plus "réfléchissant". Autrement dit réfléchir par delà l'histoire, dans la dialectique rousseauiste, ce qu'elle nous apprend sur notre société actuelle.
Tout d'abord il apparaît dans l'héritage du XVIIIe siècle une constante, et celle du régime politique, toujours déterministe sur les hommes (en tant qu'un béhaviorisme structurel), du moins ce me semble, en ce qu'il se "reproduit" dans ces inégalités "naturelles", ce même état et que Rousseau décrivait déjà dans son temps, par les privilèges aristocratiques, n'en déplaise à Voltaire. Kant nous parlait, lui, de "l'insociable sociabilité" sur le sujet, et y voyait un certain "plan de la nature"... Sans condamner pour autant, Rousseau en acceptait l'augure, en effet, et cette acception du fait qu'un gouvernement aristocratique, dans le cadre d'un pays "important" par la taille et le nombre de ses habitants, parvenait mieux à se gouverner ainsi. De rajouter là car c'est essentiel, qu'il faut considérer le gouvernement chez Rousseau comme celui qui exécute la volonté générale seulement, mais nous allons y revenir. Une démocratie étant "mieux" en mesure d'être opérante dans de petits Etats à la plus faible population. "S'il y avait un peuple de dieux, il se gouvernerait démocratiquement. Un gouvernement si parfait ne convient pas à des hommes". (cf G.F. p.107 "Du contrat social" présentation de Bruno Bernardi)
Ensuite, par "religion" il ne faut entendre là je ne sais quelle confession qui, elle, serait alors tout à fait singulière et personnelle et ce, même si elle est partagée du plus grand nombre ou par quelque communauté religieuse séculière ou régulière, et dans le siècle et dans la règle...mais bien précisément de "religion civile" ! Et celle qui, en l'occurrence, sera l'objet des plus bienveillantes et récurrentes attentions du législateur, de l'exécutif et à l'adresse du peuple en tant que sujets et citoyens et non en qualité d'homme "naturel"...Seule nécessité absolue et dans une "volonté générale" dorénavant "assurée" et "durable", alors gage de la République et de la socialisation d'un peuple donné. Il faut aussi préciser que ce peuple ne peut en effet conduire sans autre constitution, précisée par ailleurs, à établir une universalité. Car un régime qui irait à un peuple, dans un pays donné, n'irait pas à un autre, [le costume étant trop petit ou trop grand] car moins prêt à recevoir, alors, tel ou tel autre principe ou telle organisation politique.
Enfin, et si en l'absence de cette "cohésion", de cette "association" (d'union politique) comme le dit Rousseau le peuple en faction venait à chercher le manque de "volonté générale" et d'esprit commun ailleurs que dans la société, alors il adviendrait sûrement une catastrophe... et, soit un retour à l'ordre naturel ou plutôt à l'"état de nature" s'opérerait...alors soit quelque individu ou groupe se tournerait vers quelque "gourou" et autre maître pour combler ce manque de cohésion sociale. Le terreau étant toujours à porté de main ou de pieds quand les esprits affaiblis cherchent une solution de substitution. Le corps politique s'effondre et le corps humain se retrouve seul...Comment imaginer un seul instant alors, que tous voudront défendre ce "corps commun" artificiel (la République et la société) si il est en péril puisqu'il n'existe pas...
"...Otez ses visions à ce fanatique et donnez lui ce même espoir pour prix de la vertu vous en ferez un vrai citoyen".
nb : Je recommande la lecture de cette biographie de Raymond Trousson (dans la collection folio biographie)